vendredi 5 mars 2010
Cloyes-sur-le-Loir,la Chapelle d'Yron: Nathalie Cunat
« Nombrils »
Dans la poursuite de son travail traitant de la fragilité, Nathalie Cunat emploie le métal pour cette série. La confrontation à un matériau résistant en soi implique des actions fortes et décisives. Elle agit sur ce support en le détériorant partiellement ; c'est-à-dire en le fragilisant par des actions radicales : brûlures, perforations, torsions, martelages.
Paradoxalement, les effets obtenus peuvent paraître délicats par leurs textures, leurs aspects satinés, brillants, moirés, ou par leurs détails pouvant évoquer parfois la dentelle…
La forme, rappelant une chemise de peau fixée sur une structure qui la rapproche d’une silhouette humaine, figure des corps, volontairement amputés de leur tête et de leurs membres supérieurs. Ainsi privés de leurs sens ils incarnent une fragilité physique, psychologique et sociale. L’armature fine et légère, qui confère à chaque pièce une forme d’instabilité et les pauses gauches, gênées, générées par l’aspect tordu et désaxé des silhouettes, renforcent cette impression.
Installation pour la chapelle d’Yron.
« J’ai immédiatement aimé ce lieu pour son espace, pour sa lumière, sa pureté, la délicatesse et la fragilité de ses peintures murales.
Puis il y a eu cette surprenante découverte lors de ma première visite de la chapelle, disant que c’est de cet endroit qu’Etienne, petit pâtre, lança en 1212 sa « Croisade des enfants ».
Croisade d’enfants ? Légende, réalité ? Vérité partielle ? Certains historiens pensent qu’il y a un doute quant au terme « pueri » qui a trois traductions possibles. En latin classique cela signifie bien « enfants », mais cela pourrait se traduire par « enfants de Dieu », ce qui suppose une autre catégorie d’âge. La troisième traduction fait état d’une classe sociale : « quiconque se trouve en situation de pauvreté ou de servilité ». Il semblerait en tout cas que dans toutes les archives on insiste sur la misère des pèlerins.
Quoiqu’il en soi cette histoire tragique et bouleversante était tellement prenante que je ne pouvais pas en faire abstraction. De plus, ma démarche, mon travail, avaient des points communs avec cet évènement et les « nombrils » me paraissaient avoir trouvé leur place ici.
J’ai voulu regrouper les « nombrils » très simplement au centre de la nef en les disposant face à la porte, comme une armée prête à partir ; leur état de fragilité et de souffrance ne présageant rien de bon.
Des sons évoquant des bruits de pas les accompagnent et viennent nous toucher physiquement. Nous sommes spectateurs et en même temps nous aimerions être acteurs pour les prévenir de l’issue de cette marche ».
nathalie cunat, 2010
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